Le social learning, l’apprentissage informel qui gagne du terrain

L’essor du digital a beaucoup enrichi les méthodes d’apprentissage au sein des entreprises sous forme d’e-learning, moocs, webinaires… Plus récemment, l’intelligence collective, promue par les réseaux sociaux internes, a fait émerger le social learning, mode de formation collaboratif, interactif, conversationnel. Attractif et efficace, ce type de pédagogie peut aussi être un booster de cohésion et de motivation internes… Comment fonctionne-t-il ?

90 % des apprentissages retenus grâce au social learning

Qui n’a jamais fait appel à un collègue pour l’aider à accomplir une tâche, comprendre un process, utiliser un nouvel outil ? Le social learning, ou apprentissage collectif, se base sur ce principe très naturel que l’on apprend avec et grâce à ses pairs. Loin des schémas classiques de la formation descendante, le social learning s’appuie sur les théories du psychologue canadien Albert Bandura qui met en avant « l’importance de l’observation et de l’imitation des comportements, attitudes et émotions des autres dans le processus d’apprentissage ». Ces théories sont par ailleurs confirmées par le constat que 90 % des savoirs s’acquièrent de façon informelle, par expérience et interaction sociale*. C’est ainsi que certaines entreprises « apprenantes », surfant sur l’omniprésence des réseaux sociaux dans nos vies, ont procédé à des transformations radicales de leur processus de formation pour enrichir et développer les compétences de leurs collaborateurs de manière participative et horizontale et non plus individuelle et verticale.

Des collaborateurs acteurs de leur formation

Tantôt apprenant, tantôt sachant : c’est sur cette alternance des postures qu’est développée une plateforme de social learning. L’idée est d’instaurer une communauté de partages permettant à chacun et chacune, selon ses compétences et appétences, de diffuser des contenus utiles pour ses collègues. Chats, forums de discussions thématiques, vidéo-conférences, blogs, intranet, réseau d’entreprise : quel que soit le moyen mis à disposition, chacun a la liberté de publier des contenus (articles, vidéos…) qui seront ensuite commentés, partagés, likés, à l’image de nos usages quotidiens sur les réseaux sociaux. Ainsi, d’éditeur de contenu à apprenant, le collaborateur change de rôle, restant toujours actif dans son processus d’apprentissage.

Capitaliser sur les contenus générés

Une plateforme de social learning repose sur la puissance du user generated content (contenu généré par l’utilisateur) qui permet aux apprenants d’être à la fois apprenant et formateur. Un collaborateur peut poser une question ouverte à laquelle répondent ses collègues, un expert interne concevoir un tutoriel pour transmettre son savoir et pouvant être enrichi et complété par l’expérience des autres, un autre de proposer une capsule vidéo sur une bonne pratique... Ces contenus et conversations utiles finissent par constituer un fonds de connaissances que l’entreprise peut décider de sauvegarder et de republier lorsque cela s’avère nécessaire.

Le social learning, comme accélérateur de motivation interne

Capitaliser sur les savoirs des collaborateurs, valoriser leurs expériences et connaissances sont d’excellents moyens de renforcer le sentiment d’efficacité personnelle, muscler la confiance de tous au sein de l’entreprise. Par ailleurs, les modalités d’apprentissage actives améliorent la motivation des apprenants et stimule leur engagement. Et même si certains sont moins actifs, ils bénéficient tout de même des savoirs des autres ! Au-delà des apprentissages qu’il enrichi, le social learning permet une montée en compétences en continu, crée du lien, et contribue à définir une culture d’entreprise.

* Étude du Center for Creative Leadership de l’université américaine de Princeton, 1990.

Cinq questions à Delphine Morisset, Product Marketing Manager chez Beedeez, plateforme de social learning

Quels types d’entreprises font appel au social learning ?
Les entreprises qui encouragent l’autonomie de leurs collaborateurs favorisent de fait leur motivation spontanée pour animer une plateforme de social learning. Mais certaines entreprises, même hors culture « libérée », appliquent l’apprentissage informel pour répondre à certains besoins spécifiques de formation interne. La RATP, en parallèle du social learning, a également mis en place du mobile learning, une technologie destinée aux collaborateurs nomades et permettant aux apprenants de créer, partager et accéder aux contenus où qu’ils soient, en responsive sur tous les supports (téléphone, ordinateur, tablette).

Les contenus produits par les collaborateurs sont-ils modérés ?
Certaines entreprises préfèrent ne pas modérer pour favoriser la spontanéité et la liberté des échanges, comptant sur le fait que l’autorégulation interne est possible. D’autres organisations optent pour une limitation des fonctionnalités de social learning à des groupes prédéfinis ou choisissent de modérer et supprimer tout simplement des contenus si nécessaire.

Comment réduire les réticences éventuelles en interne ?
Certaines structures misent sur des ambassadeurs internes pour amorcer le partage sur le flux de leur communauté : lorsque l’un d’eux commence, les autres suivent et l’émulation entre collègues fait son effet au sein de la communauté. On peut aussi enrichir le social learning de formes de pédagogies incitatives : la gamification qui intègre le jeu dans les processus d’apprentissage est très attractif ! Le module d’ancrage mémoriel, quant à lui, est très intéressant pour réviser des connaissances transmises par la communauté. Ce module aide à intégrer les nouvelles notions tranquillement, et surtout durablement. Intéressant lorsque l’on sait que, selon la théorie de la courbe de l’oubli, on peut perdre, après deux semaines, 90 % de ce que l’on a appris !

Les outils digitaux ne créent-ils pas un fossé entre les différentes générations ?
Les interfaces doivent être faciles et intuitives car l’expérience doit être agréable pour tous les utilisateurs, quels que soient leur âge et culture. Les générations Z et les millenials ont l’habitude d’avoir tout, tout de suite, les outils doivent être agiles et ergonomiques. C’est primordial !

Constatez-vous une demande plus importante de solutions de social learning ?
La demande est de plus en plus forte parce que ce mode d’apprentissage reflète la façon dont les gens vivent aujourd’hui : partages, apports des autres, bénéfices des savoirs, enrichissement par ses pairs. En période post-covid et dans le contexte de la généralisation du télétravail, garder le lien avec les personnes et partager est essentiel. Il y a vraiment une hausse des besoins !