Métiers de la biodiversité : la filière vue par deux pros

Préserver la biodiversité est avant tout une réalité de terrain. Métiers, formations, qualifications… Pour en parler, Laura Beau, chargée d’études scientifiques dans la réserve naturelle nationale de Chérine et Emmanuel Moitry, chargé d’ingénierie et de formation à l’Office National des Forêts.

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Qu’entend-on par « préservation de la biodiversité » ?

Laura Beau : Des actions visant à préserver des milieux naturels pour en retenir la diversité biologique, végétale comme animale. Dans les années 60 par exemple, quasiment tout le territoire de l’actuelle réserve naturelle de Chérine (Indre) était cultivé. L’arrêt de l’agriculture, puis la création de la réserve en 1985 ont demandé un gros boulot d’aménagement, notamment trois étangs pour accueillir des oiseaux rares et menacés, des libellules, les cistudes (tortue d’eau douce), mais aussi des milieux ouverts (prairies naturelles, landes). Donc une réserve est le résultat d’un travail intense de l’homme, dans sa mise en place comme dans son entretien.

Emmanuel Moitry : J’ajouterais que beaucoup de métiers peuvent participer à la préservation de la biodiversité, selon la façon dont ils sont exercés. Par exemple avec un agriculteur qui cultive ses terrains en permaculture ou qui plante des haies bocagères entre ses parcelles pour accueillir des hérissons, oiseaux et insectes…

Justement, quels sont les métiers spécifiques à la préservation de la biodiversité ?

Laura Beau : Les opportunités sont nombreuses : encadrement du personnel, animations auprès du public, chercheurs, gardes, chargés de mission, techniciens, ingénieurs... Les milieux naturels étant également diversifiés, les compétences recherchées ne seront pas les mêmes en milieu marin, montagnard ou autres milieux terrestres.

Emmanuel Moitry : Je rejoins Laura sur la diversité des profils. Pour protéger et gérer durablement les forêts par exemple, l’Office National des Forêts (ONF) fait appel à des ouvriers sylviculteurs, dont l’action d’entretien passe notamment par la coupe de bois et la plantation de jeunes arbres ; des animateurs en espaces naturels, professeurs et ambassadeurs de la forêt auprès du public ; des technico-commercial bois, qui pilotent l’exploitation des bois et valorisent au mieux les arbres récoltés…

Est-ce automatiquement synonyme de travail en plein air ?

Laura Beau : Cela dépend du poste choisi. Lorsqu’il s’agit, comme moi, d’effectuer le suivi d’une espèce d’oiseaux ou de ma collègue qui assure l’animation de la réserve auprès du public, le travail en plein air est souvent quotidien au printemps et en été. Pour traiter les résultats d’observation, je dois passer du temps devant mon ordinateur. Cependant, certains postes nécessitent de travailler en extérieur toute l’année, pour l’entretien des milieux naturels par exemple.

Emmanuel Moitry : En effet, tout dépend du poste occupé. Les personnes exerçant des métiers d’étude et de conception passent davantage de temps en intérieur. Les conducteurs de travaux à l’ONF passent beaucoup de temps sur la route car ils assurent le relais entre le technicien forestier territorial, qui décide et prescrit les travaux à effectuer, et les ouvriers qui les mènent à bien. Pour ce manager de chantiers, l’extérieur est son terrain de jeu.

Quelles sont les qualités requises pour ces métiers ?

Laura Beau : Elles dépendent des profils de postes. Bonne condition physique pour le travail effectué en extérieur (gestion et entretien des milieux naturels) ; aisance à l’oral, passion et flexibilité horaire pour les animateurs des réserves (travail les week-ends et jours fériés) … Une chargée d’études comme moi peut travailler en suivi des espèces tôt le matin et tard le soir, et la nuit pour les espèces nocturnes… Je laisse Emmanuel préciser, mais l’adaptabilité et la souplesse d’esprit me semblent aussi indispensables.

Emmanuel Moitry : Tout à fait, nous rencontrons dans nos métiers des intervenants variés : élus, scientifiques, acteurs économiques du territoire, touristes... Sensibiliser à la préservation de la nature demande de l’écoute et la diplomatie, de l’empathie et un bon relationnel car les interlocuteurs n’ont pas forcément les mêmes convictions que nous. Et bien sûr, citons la curiosité d’esprit, le sens de l’organisation et de l’analyse, la rigueur et l’ingéniosité.

Si l’on n’a jamais travaillé dans le secteur, quelle stratégie adopter pour le rejoindre ?

Laura Beau : Renseignez-vous auprès des associations de votre région et proposez vos services comme bénévole. En découlera différentes opportunités de stages, de services civiques…
Pour les trouver, rendez-vous sur les sites dédiés : Office français de la biodiversité, les conservatoires d’espaces naturels, les Parcs naturels régionaux de France, la Ligue pour la Protection des Oiseaux, la Société nationale de la protection de la nature… Il y a aussi les agrégateurs comme Tee Tree, J’agis pour la nature, Volontaires Nature, Diffuz… Sans oublier leurs comptes réseaux sociaux (Twitter, Facebook).

Emmanuel Moitry : En effet, un ou plusieurs stages de découverte me semblent essentiels, avant des stages et des formations en alternance qui permettent d’apprendre rapidement un métier. Rendez-vous sur place pour rencontrer les professionnels, poser vos questions afin de mieux cerner les attendus des missions et de pouvoir vous projeter.

Où trouver les jobs de la biodiversité ?

Laura Beau : Réseau Tee, le site le plus consulté et « spécialiste de l'emploi environnemental », celui du réseau des Réserves Naturelles de France, de la Fédération des Parc Naturels Régionaux, de la Fédération des Conservatoires d'espaces naturels, de la Société Française d’Écologie, des associations qui agrègent les offres comme France Nature Environnement… Les universités ou autres organismes de recherches en publient régulièrement également.

Emmanuel Moitry : Il y a aussi les sites des bureaux d’études, des collectivités territoriales, des associations et des organismes publics, tels que l’Office français de la biodiversité. Pour les postes disponibles à l’Office National des Forêts, rendez-vous ici.

DES MÉTIERS POUR TOUS NIVEAUX DE FORMATION

BAC +2

  • CAPA (certificat d’aptitude professionnelle agricole)
  • BTA (brevet de technicien agricole)
  • BTA GFS (brevet de technicien agricole spécialisé sur la gestion de la faune sauvage)
  • BTSA GPN (Brevet de technicien supérieur agricole Gestion et Protection de la Nature)

BAC +3

Licence Professionnelle spécialisée dans les métiers de la protection et de la gestion de l'environnement.

BAC +4/5

Masters I et II en écoles d’ingénieurs, en biologie, en écologie, en urbanisme.